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Propriétés physiques et chimiques

A l'état de gaz, le dioxyde de carbone est incolore, inodore et aisément liquéfiable. Sa température critique se situe à 31,06 °C. Sa masse molaire est de 44, sa densité par rapport à l'air dans les conditions normales de température et de pression est de 1,52.

A l'état solide, la neige carbonique est produite par brusque détente de CO2 sous pression. Lors de sa projection à l'air libre, elle est à la température de - 78,5 °C. Elle est immédiatement sublimée, c'est-à-dire transformée de solide en gaz sans passer par l'état liquide.

Le dioxyde de carbone est normalement stocké sous forte pression dans des bouteilles ou, sous basse pression, dans des réservoirs réfrigérés, où il est partiellement liquéfié.

A la température de - 56,6 °C et à la pression absolue de 5,2 bar, le gaz se présente sous les trois états : solide, liquide et gazeux. Ce point particulier est baptisé « point triple ». En dessous de ce point, peuvent exister les états gazeux et solides, ce dernier ne subsistant que si la pression est suffisante.

Entre - 56,6 °C et + 31,06 °C (point critique) peuvent exister les états gazeux et liquide, celui-ci également sous une pression de plusieurs bars. Au-dessus de + 31,06 °C, n'existe plus que l'état gazeux.

Elle varie en fonction des températures et des pressions. A - 30 °C, sous pression de 1 bar (état gazeux), elle est de 2,20 kg · m-3 et sous pression de 60 bar (état liquide), elle est de 1 100 kg · m-3.

A + 65° C, sous les mêmes pressions (cette fois sous état gazeux uniquement) ces valeurs atteignent respectivement 1,58 et 121 kg · m-3.

La vaporisation de 1 kg de dioxyde de carbone solide ou liquide produit un volume gazeux de plus de 500 litres à + 15 °C sous pression atmosphérique. On note que 1 kg de gaz liquide ou solide occupe un volume d'environ 0,9 litre dans une citerne réfrigérée entre - 15 °C et - 30 °C.

Le dioxyde de carbone se dissout partiellement dans l'eau pour former un acide faible : l'acide carbonique. La quantité dissoute augmente avec la pression, mais diminue quand s'élève la température. Il est également soluble dans les halogénés.

Entre 2 000 et 5 000 °C, le dioxyde de carbone se décompose en CO et en oxygène. Il se décompose aussi sous l'action des ultra-violets, en présence de carbone à chaud, en présence d'hydrogène et dans les feux de métaux.

La molécule de CO2 est très stable, mais à quelques centaines de °C, une réaction se produit avec les métaux, réducteurs d'oxygène, notamment les alcalins et le titane. Le dioxyde de carbone ne convient donc pas pour les feux de métaux.

Mode d'action

Le dioxyde de carbone agit essentiellement par réduction de la teneur en oxygène de l'air à une valeur à laquelle le feu ne peut plus naître ni s'auto-alimenter. L'effet de refroidissement du CO2 est minime comparativement à l'effet d'étouffement.

L'abaissement de la teneur en oxygène sera obtenu par injection d'une plus ou moins grande quantité de CO2, en fonction de la nature du combustible et suivant que l'on agit préventivement (purge ou inertage) ou pour éteindre un feu déclaré.

Propriétés extinctrices

La concentration extinctrice est le rapport final entre le volume du dioxyde de carbone gazeux (calculé à la pression atmosphérique) restant dans l'espace protégé et le volume de cet espace.

Pour obtenir cette concentration il est évident que le volume réel de gaz injecté sera supérieur au volume final, puisque le local où se situe le feu à combattre n'est jamais hermétiquement clos.

Il existe toujours des fuites, si minimes soient-elles. Le gaz diffuse spontanément dans tout l'espace qui lui est offert.

Ainsi, dans les installations d'extinction automatique, en protection ponctuelle, comme en protection d'ambiance, le facteur de sécurité applicable aux concentrations théoriques d'extinction, afin de compenser les fuites, est de 20 % (standard NFPA 12 et règle APSAD R3). Compte tenu de ce facteur, la concentration minimale d'usage est de 34 %.

Cette concentration minimale est applicable pour éteindre certains types de combustibles (essence, méthane, gazole, butane) ; elle est insuffisante pour d'autres matières ou pour l'extinction de feux d'équipements particuliers. Aussi, les matériaux nécessitant une densité de CO2 plus importante sont-ils affectés d'un coefficient de concentration, appelé « facteur KB » dont il y a lieu de tenir compte pour déterminer la quantité de CO2 nécessaire à l'extinction d'un feu dans une enceinte, conjointement avec les données relatives au volume à protéger.

Le tableau ci-après donne les valeurs de KB et les taux de concentration d'usage pour l'extinction de quelques matières inflammables (règle APSAD R3 et norme ISO 6183) :

 

Matériau combustible

Facteur KB

Concentration de calcul

de CO2 en %

Feux de gaz et de liquides

 

 

Acétone

1

34

Acétylène

2,57

66

Alcool éthylique

1,34

37

Benzol, Benzène

1,1

35

Butadiène

1,26

41

Hydrogène

3,3

75

Kérosène

1

34

Méthyle éthyle cétone

1,22

40

Monoxyde de carbone

2,43

64

n-Heptane

1,03

43

Oxyde d'éthylène

1,80

53

Feux de matières solides  (1)

 

Règle APSAD R3 - ISO 6183

Matière cellulosique

2,25

61 62

Coton

2

57 58

Papier, carton ondulé

2,25

61 62

Matière plastique (granulaire)

2

57 58

Polystyrène

1

34

Polyuréthane vulcanisé

1

34

Cas spéciaux d'application

 

 

Salle de câbles, gaines contenant des câbles (2)

1,50

47

Ordinateurs (2)

1,50

47

Installations de peinture par pulvérisation et de séchage

1,20

40

(1) Il s'agit de matières susceptibles de donner lieu à des feux profonds et une concentration de 34 % doit être maintenue pendant au moins 20 minutes.

(2) Une concentration de 34 % doit être maintenue pendant au moins 10 minutes.

Concentrations nécessaires pour inertage et purge

Il existe des valeurs-limites de teneur en oxygène de l'air au-dessous desquelles l'inflammation de divers gaz ou vapeurs devient impossible. Ces valeurs varient avec la nature des gaz inflammables contre lesquels le dioxyde de carbone sera appelé à intervenir.

Les tableaux suivants indiquent, pour les produits les plus courants :

La valeur Lo (tableau I) de la teneur en oxygène de l'air en dessous de laquelle l'inflammation de gaz ou de vapeurs devient impossible. Un deuxième tableau (tableau II) indique cette valeur Lo pour des poussières inflammables.

La valeur Lc (tableau III) de la teneur en combustibles divers en dessous de laquelle leur mélange avec le dioxyde de carbone devient ininflammable.

Ces valeurs sont propres au dioxyde de carbone.

 

Tableau I

Gaz ou vapeurs inflammables

Valeur de Lo (CO2)

Acétone

15,5 %

Acétylène

9,5 %

Benzène

14 à 15 %

Butadiène

13,5 %

Essence, kérosène

14 à 14,5 %

Ethane

13,5 à 14 %

Ethanol

13,5 à 14 %

Ether éthylique

13 %

Ethylène

11,5 à 12,5 %

Hydrogène

6 à 7 %

Méthane

14,5 à 15,5 %

Méthanol

13,5 %

Monoxyde de carbone

7 à 9 %

Pentanes, hexanes

14,5 à 15 %

Propane, cyclopropanes, butanes

14 à 15 %

Propylène, butylènes

14 à 14,5 %

Sulfure de carbure

8 à 8,5 %

Sulfure d'hydrogène

11  %

Chiffres valables aux conditions ordinaires de température et de pression.

 

Tableau II

Poussières inflammables

Valeur de Lo (CO2)

Caoutchouc

13 à 14 %

Cellulose

12 à 14 %

Charbon

15 à 16 %

Sciure de bois

14 à 15 %

Soufre

10 à 11 %

Produits organiques en général

> ou = 11,5 %

 

Tableau III

Gaz ou vapeurs inflammables

Valeur de LC (CO2)

Acétone

13,5 %

Acétylène

6 %

Benzène

7 %

Butadiène

7 à 7,5 %

Butane

9,5 à 10 %

Butylène

9 à 9,5 %

Essence

6 à 7 %

Ethane

11,5 à 12 %

Ethanol

15 %

Ether éthylique

8 %

Ethylène

10 %

Hexanes

6,7 %

Hydrogène

6,5 à 7 %

Méthane

22 à 24 %

Méthanol

23 à 24 %

Monoxyde de carbone

25 à 30 %

Oxyde d'éthylène

10 %

Pentanes

7,5 %

Propane, cyclopropane

11 %

Propylène

11 %

Sulfure de carbone

2,5 %

Sulfure d'hydrogène

9 %

Mise en œuvre
Domaine d'utilisation

L'emploi du dioxyde de carbone comme agent extincteur résulte des deux caractéristiques suivantes :

Il ne nécessite aucune énergie auxiliaire, puisqu'il est expulsé par sa propre pression.

En revanche, à l'air libre ou dans des locaux ouverts, son action est fugace, sauf s'il est utilisé sous forme de neige carbonique sur des feux de surface de combustibles solides ou sur des feux de conducteurs électriques. Dans ce cas, il est apte à éteindre des feux de produits à point d'éclair très bas (essence, hydrocarbures légers, ...).

En définitive, le dioxyde de carbone convient pour les feux de classe B, feux de liquides ou de solides liquéfiables, et dans certaines conditions, pour les feux de classe A (feux de solides avec formation de braises et au voisinage des installations électriques sous tension). A la rigueur il peut être utilisé pour des feux de classe C (feux de gaz).

Il convient bien pour l'intervention manuelle sur feux de flaques de produits chimiques et pour feux de volumes :

Restrictions et limites d'emploi

En extinction, aux températures inférieures à 0 °C, la tension de vapeur du dioxyde de carbone diminue, ce qui entraîne une diminution de débit et de portée. En basse pression, on peut descendre jusqu'à - 20 °C, ce qui est sa température moyenne de stockage. En haute pression, la limite supérieure de température de stockage ne doit pas dépasser 50 °C au taux de chargement normal, et 63 °C au taux tropical.

Ce sont les feux de classe A dont la plus grande partie de l'énergie est dans la masse du combustible : matériaux empilés, archives, silos, fourrages, tabacs... Le dioxyde de carbone utilisé en installations fixes peut lutter contre eux, mais n'est pas le plus efficace.

Sa dilution immédiate dans l'air limite son efficacité.

Comme tous les non-conducteurs, le dioxyde de carbone développe des charges électrostatiques dans les circuits de distribution fixes. On prendra donc la précaution élémentaire de relier ceux-ci à la terre, surtout en présence de risques d'explosion dans les locaux à protéger.

Par le brusque refroidissement qu'il entraîne (il est émis à - 70 °C), le dioxyde de carbone risque de détériorer certains matériels sensibles aux chocs thermiques. En cas d'installations fixes, on aura soin de disposer les diffuseurs de façon à provoquer une diffusion de la neige bien répartie, et en évitant le jet direct sur un de ces appareils.

Interdictions d'emploi

Le dioxyde de carbone est à proscrire absolument sur les feux de classe D, feux de métaux légers ou réactifs et leurs hydrures (magnésium, aluminium, sodium, potassium, zirconium, titane, etc.), qui le décomposent à haute température.

Il ne doit pas non plus être employé, pour les mêmes raisons, sur des feux où sont impliqués des corps très avides d'oxygène ou instables : nitrates, chlorates, peroxydes, explosifs...

Sur les feux de charbon dans la masse, il est inopérant car il se décompose en monoxyde de carbone (combustible) en présence de carbone.

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