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2.1.11. LA COMBUSTION DES SOLIDES | ![]() |
LA PYROLYSE
Lorsqu'ils sont portés à une certaine température, la plupart des solides donnent lieu à une combustion en deux étapes : la gazéification et la combustion des gaz obtenus. Il se produit, lors de la première étape, une décomposition chimique irréversible du matériau, sans réaction avec l'oxygène de l'air environnant. Les produits engendrés par cette décomposition sont essentiellement gazeux, accompagnés ou non de liquides et solides, suivant la nature du combustible et les conditions dans lesquelles intervient la combustion.
Le phénomène de pyrolyse précède nécessairement la combustion de la plupart des composés organiques solides, en particulier de ceux d'origine naturelle (bois, charbon, fibres textiles, papier) et des polymères artificiels (matières plastiques).
Plus on élève la température, plus le dégagement gazeux est important et, si les gaz produits sont combustibles, ils forment avec l'air un mélange qui, toujours dans les limites du domaine d'inflammabilité, est susceptible de s'enflammer, soit sous l'effet d'une source d'allumage, soit par auto-inflammation si la température est suffisante. Les gaz chauds créent un courant de convection qui permet à l'oxygène d'accéder à la zone de combustion.
LE FEU DE TYPE BRAISE
D'autres solides, sous l'action de la chaleur, ne changent pas d'état physique et émettent peu ou pas de gaz de pyrolyse.
Le matériau brûle sans flamme ; la combustion est révélée par de la fumée et par une élévation de la température. Pratiquement toute l'énergie dégagée est réutilisée pour l'entretien de la combustion. C'est le feu de type braise (ou feu couvant).
Certains matériaux, tels le charbon, le charbon de bois et certains métaux, chauffés suffisamment, brûlent à l'état solide, pratiquement sans flamme, mais avec émission de rayonnements émanant de la zone de combustion, donnant un feu de braises.
En réalité, la combustion de la plupart des matériaux combustibles solides procède à la fois de la combustion de type gaz et de la combustion de type braise. Il y aura donc présence simultanée de flammes et de braises. C'est le cas de toutes les matières cellulosiques : bois, papiers, cartons, tissus, etc. et de la plupart des matières plastiques.
LA COMBUSTION DES POUSSIÈRES
Plus un solide est divisé, plus il offre à l'oxygène ambiant une surface importante. Un cube de bois de 10 cm de côté a un volume de 1 000 cm3, soit l'équivalent d'un litre. Imaginons qu'il soit constitué de parcelles d'une dimension de 1/100 mm de côté ; la surface totale combustible de ce litre de poussière serait de 60 m2. On conçoit aisément que, toutes conditions étant réunies par ailleurs, l'inflammation du combustible divisé sera plus facile que celle du cube.
Le comportement des poussières est sensiblement différent suivant qu'elles sont déposées en couches plus ou moins épaisses sur une surface ou qu'elles sont en suspension dans l'air. Dans le premier cas, la combustion démarre lentement, puis provoque des « flashes » qui entraînent des envolées de poussière s'enflammant à leur tour. Les poussières en suspension, répandues sous forme de nuage, réalisent un contact intime avec l'oxygène de l'air. En mélange d'une concentration convenable, une source d'énergie suffit à propager la flamme dans le nuage, puis d'un nuage à l'autre, entraînant une explosion généralisée.
La température d'inflammation des poussières issues de matériaux combustibles est de l'ordre de 300 à 600 °C et la quantité de poussière critique se situe entre deux limites, inférieure et supérieure, comme dans le cas des mélanges gazeux. La limite inférieure est de l'ordre de 15 à 40 g/m3. Généralement, plus une poussière est fine, plus basse est sa limité inférieure d'inflammabilité, son point d'inflammation et l'énergie minimale d'activation nécessaire pour l'enflammer. Ceci est également vrai pour les poussières imprégnées de liquides à bas point éclair.
La combustion des poussières peut donc prendre des proportions de développement extraordinaires conduisant au régime de l'explosion, aussi bien pour des poussières organiques (farine, sucre, bois, liège, cuir, coton, café, épices, papier), des poussières de produits chimiques industriels (soufre, engrais, matières plastiques), que pour certaines poussières métalliques (aluminium, magnésium) ou les poussières de charbon.
LA COMBUSTION SPONTANÉE
Certaines substances peuvent entrer en combustion en se combinant avec l'oxygène de l'air, sans apport d'une source de chaleur extérieure.
L'oxydation débute lentement ; elle dégage un peu de chaleur qui accélère la réaction puis, si la chaleur dégagée par les réactions d'oxydation est dissipée moins vite qu'elle n'est produite (par exemple, si l'entassement s'oppose à une évacuation de la chaleur), l'élévation de température peut conduire à l'inflammation : c'est la combustion spontanée.
La combustion spontanée peut être soit d'origine chimique (phénomène d'oxydoréduction, sans action d'organismes vivants), soit biochimique, faisant entrer en jeu des organismes vivants (bactéries par exemple). Ces dégradations donnent naissance à des corps composés possédant des groupements fonctionnels : alcool, aldéhyde ou acide avec dégagement de gaz (oxygène, hydrogène, oxyde de carbone, gaz carbonique..., ainsi que des gaz composés plus ou moins inflammables).
Les matières organiques sont très présentes dans notre environnement. Qu'elles soient naturelles (bois, paille, graines, végétaux, textiles, papiers, cartons, cuirs, engrais naturels, charbon, graisses...) ou de synthèse (tous produits fabriqués artificiellement), elles sont très sensibles aux conditions du milieu dans lequel elles se trouvent.
Ainsi, le mécanisme de leur dégradation est influencé, outre la forme sous laquelle se présente le produit (plus ou moins divisé), par des facteurs tels que :
- L'hygrométrie
Elle peut être intrinsèque ou provenir du milieu extérieur ; elle active l'oxydation et favorise l'échauffement.
- L'acidité
Plus une matière est acide, moins elle est sensible à la dégradation. Proche du neutre (pH 7), la fermentation sera lente et peu active. Légèrement basique (pH situé entre 7 et 8), la fermentation sera rapide.
- La température
Une température basse bloque toute fermentation ; une température élevée aussi. En revanche, une température moyenne, variable suivant les matières, déclenche la réaction, et, par synergie, amplifie la chaleur déjà produite par la réaction ou bioréaction.
- Le milieu
En milieu aérobie (en présence d'air), l'élévation de température est faible. Les éléments vivants entrant dans le processus génèrent des sous-produits peu susceptibles de s'enflammer. En milieu anaérobie, les bactéries sont différentes. Le processus est plus lent, mais l'élévation de température plus forte. Les produits de la réaction (hydrogène, méthane, éthane, ...) forment des mélanges combustibles.
Les sinistres dus à la combustion spontanée
Outre certains produits chimiques, les produits susceptibles d'échauffement pouvant aller jusqu'à l'inflammation spontanée au contact de l'air ne sont pas légion et supposent la réunion de certaines conditions physico-chimiques. Il s'agit essentiellement des poussières de certains métaux, la poussière de charbon ou de charbon de bois, la tourbe, les huiles végétales, des balles de papier ou de textiles et certains produits alimentaires et agricoles.
Les sinistres les plus spectaculaires sont ceux qui se produisent dans les exploitations agricoles. Les produits les plus exposés sont les fourrages qui ont été entreposés encore humides (degré d'humidité compris entre 20 et 40 %) en grosses piles (paille, foin, luzerne), le tabac en vrac et les produits qui, ayant une forte teneur en huile, s'oxydent facilement (maïs, lin, colza). La fermentation biologique démarre le plus souvent 2 à 6 semaines après le stockage et, si la ventilation n'est pas suffisante, la chaleur dégagée au sein des couches profondes ne peut s'évacuer, entraînant des processus d'oxydation qui accélèrent le phénomène. Le feu peut mettre des semaines, voire des mois à se déclarer.
Des combustions spontanées peuvent aussi prendre naissance dans des tas de chiffons, étoupe, copeaux de bois imprégnés d'huile, d'essence de térébenthine, de vernis, de diluants, de siccatifs, etc. Des produits non susceptibles de s'enflammer spontanément dans leur conditionnement habituel, mais qui, absorbés par des matériaux poreux, présentent à l'air une surface importante qui favorise leur oxydation et, par conséquent, l'élévation de la température. Cette chaleur entraîne la décomposition du support et l'inflammation des gaz ainsi générés.
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